La donnée des visiteurs, futur des salons, foires et expositions

Après trois belles années passées dans l’univers des salons, des expositions, des foires et des congrès, j’ai quitté Viparis au début de l’été. L’occasion d’écrire ici sur un sujet qui me tient à cœur et que commence à considérer timidement l’industrie événementielle, celui de la donnée. Pour ceux d’entre vous qui recherchent des solutions pouvant être mises en œuvre directement, je vous invite à consulter le guide des start-up de French Event Booster, la plateforme d’innovation événementielle que nous avons mise en place avec Paris&Co il y a trois ans.

 

Salon du Livre de Paris
Salon du Livre de Paris – ActuaLitté, CC BY-SA 2.0, via Wikimedia Commons

Tout d’abord un mot sur les Cassandre qui nous prédisent la fin des voyages d’affaire. La crise du Coronavirus nous a rappelé, dans la douleur, que nous sommes des êtres sociaux qui avons besoin d’échanges formels et informels auxquels le virtuel ne se substitue pas. Le meilleur algorithme d’IA ne remplacera pas le hasard des rencontres et les déambulations discrètes entre les stands. De ce point de vue les salons virtuels sont un échec. Le rassemblement dans une unité de temps et d’espace est le gage d’efficacité des salons et des congrès. Lorsque je participais au Web Summit de Lisbonne, trois jours me permettaient de faire autant de veille technologique que le reste de l’année.

 

Mais revenons à la data en prenant un exemple qui parle à chacun : celui d’un salon. Il rassemble quatre types d’intervenants : l’exploitant du lieu, l’organisateur de l’événement, les exposants et les visiteurs. Pour l’exposant un salon rentre généralement dans le cadre d’un budget de communication. Celui-ci est ventilé entre différents médias : la presse papier, la télévision, la radio, le cinéma, l’affichage, l’événementiel, la pub en ligne… Or cette dernière a changé la donne. Sur internet il est possible de mesurer très précisément l’efficacité d’une campagne en termes de taux d’acquisition de prospects et de taux de conversion en clients. D’autres médias ont emboité le pas du web et fait leur mue. Ainsi les affichages publicitaires les plus récents du métro ou ceux de nos rues sont capables de compter le nombre de vue et de savoir précisément comment s’est déplacé le regard du passant sur la publicité. En revanche, pour un salon, la donnée mesurée se limite encore bien souvent à un nombre global de visiteurs pour l’ensemble de l’événement et non pour chaque exposant. Lorsqu’il va s’agir pour une direction de la communication de justifier ses choix en matière d’allocation budgétaire, elle aura plus d’arguments chiffrés – et donc objectifs – fournis par les nouveaux médias que par l’événement physique « classique ».

 

Il y a donc deux enjeux pour que l’industrie événementielle reste pleinement compétitive en tant que medium : déterminer l’indicateur d’efficacité qu’elle doit mesurer et la manière la moins contraignante de le faire pour le visiteur. Pour ce qui est de l’indicateur il s’agit de mesurer l’exposition à la marque et aux produits de l’exposant. On peut considérer qu’un visiteur a été « converti » en prospect dès lors qu’il est passé par un stand, ou bien dès lors qu’il s’est arrêté un certain temps dessus, ou bien dès lors qu’il a échangé avec l’exposant, ou bien dès lors qu’il a laissé ses coordonnées pour être recontacté. Pour ce qui est de la manière de mesurer cet indicateur beaucoup de solutions existent déjà. Les tapis de comptage de Technis permettent d’avoir une idée précise des flux de visiteurs. Certains salons imposent le scan du badge du visiteur comme préalable à tout échange avec l’exposant. Apple le faisait dès le début des années 2000 dans ses Apple Expo mais cela reste contraignant. Certains exposants continuent de compter les cartes de visites amassées en fin de salons professionnels, mais cela reste un indicateur assez restrictif qui ne tient pas compte de l’exposition de l’ensemble des visiteurs à la marque et à ses produits. Finalement, la mesure la plus représentative viendra peut-être, comme dans le métro, de caméras vidéo savamment placées autour du stand. Avec des algorithmes de machine learning elles sont capables de mesurer la durée des vues et donc l’attention des visiteurs sur un stand. Des géants comme Fujitsu ou Bosch le font déjà efficacement en vidéo surveillance ou pour analyser les parcours clients dans le retail. Mais l’avantage des magasins est d’exploiter un réseau de caméra fixe. L’événementiel est l’industrie de l’éphémère. Il y a dès lors un modèle économique à construire avec les organisateurs d’événements ou les exploitants de site pour proposer une solution abordable aux exposants.

Le stade suivant serait d’associer des profils socio-économiques de visiteurs à ces mesures individualisées au niveau des stands. Cela ne peut se faire sans le consentement du visiteur et nécessite donc de lui apporter une contrepartie. Lors du dernier Salon International de l’Air et de l’Espace, les participants se voyaient offrir la possibilité de se géolocaliser précisément au sein des halls d’exposition avec leurs téléphones. Ils pouvaient rentrer le nom d’un stand et y être guidé. Nous avions pour cela parsemé le parcours de bornes bluetooth low energy, une solution abordable. En contrepartie il eut été tout à fait envisageable de suivre, avec leur consentement, l’ensemble du parcours des visiteurs ainsi localisés. Néanmoins pour être représentatif il eut fallu un grand nombre d’utilisateurs or la géolocalisation en intérieur n’est pas assez rentrée dans les usages.

 

Bien évidemment l’efficacité d’un événement comme medium de communication se mesure aussi sur le long terme, il faut donc prendre en compte les retombées avant, pendant et après l’événement. C’est la niche incroyablement porteuse qu’occupe la start-up Bziiit en analysant, entre autres, les bruissements de nos réseaux sociaux.

 

Un dernier mot sur la billetterie. Elle reste l’un des moyens les plus efficaces de connaître son visiteur, or les organisateurs d’événements sont encore peu nombreux à s’être pleinement investis dans la connaissance de leurs clients finaux. La raison, comme dans beaucoup d’autres industries, tient surtout à l’usage de CRM généralistes, personnalisables à l’infini donc inutilisables par défaut. Encore une niche à occuper pour une future start-up…

Passionné d'innovation, ex Natixis, Groupe La Poste et Lab vente-privee.com. Le Phare Digital est un blog personnel, mes opinions n'engagent bien évidemment que moi.

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