28 novembre 2011
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Par
François Guéno/
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- Actualités, Non classé
« Elle a les yeux revolver, elle a le regard qui tue ». C’est sans doute ce que s’est dit Marc Simoncini en passant de Meetic à Sensee, un site e-commerce spécialisé dans la vente de lunettes. Pourtant le web n’a pas attendu Sensee pour voir fleurir des pures players de l’optique : Direct Optic, Confort Visuel,
Optique Sergent… Comment se différencie Sensee ? Peut-on véritablement vendre des lunettes sur internet ? Le Lab tente d’avoir les yeux en face des trous.
Sommaire
Aspect médical et prise de mesure
Le module de réalité augmentée
Quick look
Sensee se distingue en recréant une expérience d’achat proche de celle des magasins. En effet, qu’attend l’acheteur lambda lorsqu’il pousse la porte de son opticien ? Il espère être conseillé sur son look, il peut aussi chercher à se rassurer quant à l’objet qui touche directement à l’un de ses cinq sens, la vue.
La première chose qui frappe en arrivant sur la homepage de Sensee c’est son look, « très 2011 » me disait mon voisin de bureau. Noir et blanc, épure, on retrouve des rubriques en bas de la page qui nous rappellent les webmagazines. Ça vous dit quelque chose ? Le Lab aussi aime l’épure.
Après cette première impression de simplicité vient le temps de ce que les consultants appellent la « réassurance ». Sur Sensee le conseil est personnifié dès la page d’accueil par les portraits de Marina, Jennifer, Justine et Eliane : comme dans un vrai magasin vous retrouvez ainsi vos opticiens et le directeur du magasin.
Allons plus bas sur la page d’accueil. Nous tombons sur le webmagazine de Sensee, de quoi avoir des conseils de mode et pas que sur les montures. Cette démarche n’est pas sans rappeler celle de Menlook et son Menlook Mag. Avec sa propre ligne éditoriale et ses coups de cœur, Sensee tranche ainsi avec ces relations transactionnelles froides et désincarnées qui caractérisent certains marchands.
Côté navigation c’est un modèle d’aide au choix avec une traditionnelle – mais très efficace – navigation à facettes. On retrouve dans les fiches produit les vues de face et de trois quart pour chaque monture, ainsi qu’un zoom au survol de chaque photo. Comme certains de ses homologues Sensee propose l’essayage virtuel des lunettes à partir de votre webcam.
Promesse et positionnement
Pendant sa beta privée, Sensee a mis en ligne une page d’attente qui communiquait sur ses lunettes moins chères. Cet argument du prix apparait toujours sur la home du site, mais se fait discret lors de la navigation. Nous n’avons pas eu l’impression d’être sur un site discount, je dirais même que nous avons oublié le prix pour nous concentrer sur nos lunettes. L’impression est encore plus vive à la vue du webmagazine. Ici on ne parle pas de bons plans pour faire baisser sa facture, mais plutôt de mode branchée bohème : le look marinière, le poncho ou la dernière série limitée Ray-Ban. L’équipe est divisée à ce sujet. Pour ma part j’aime l’idée de pouvoir acheter moins cher sans avoir l’impression d’entrer chez Lidl. Les lunettes sont plus qu’un accessoire pratique, c’est un prolongement de votre visage, de votre personnalité. L’interface léchée d’un Sensee participe à ce processus d’identification positive. Sensee nous démontre qu’on peut avoir le beurre et l’argent du beurre : l’optique moins chère et le service. Cependant d’autres acteurs du discount ont prouvé l’efficacité d’interfaces volontairement plus agressives sur leur positionnement prix. En témoigne Cdiscount et ses bannières « sapin de Noël », très efficaces si vous n’aviez pas compris le message : ici on casse les étiquettes. L’interface épurée d’un Sensee et son webmagazine façon Vogue risquent-ils de semer le trouble dans l’esprit des internautes ?
Et alors, les prix ?
C’est sans doute le principal défaut du site : on vous donne le prix de la monture mais pas directement celui des verres. Pour cela il vous faudra créer un compte puis rentrer l’ensemble de vos informations de correction : écart pupillaire, sphère, cylindre, axe… Une démarche fastidieuse lorsque on cherche simplement à avoir un ordre de grandeur du prix d’une paire de lunettes. Par comparaison le concurrent Direct Optic donne le prix des verres avant de demander à l’internaute sa correction exacte, et ce sans inscription préalable.
Quid de la compétitivité du site ? Nous avons là encore comparé Direct Optic à Sensee sur le prix des verres (unifocaux, antireflets, anti-rayures, hydrophobes, amincis à 1,67). Il vous en coutera 69€ chez Direct Optic, 150€ chez Sensee. Les prix des montures semblent se valoir à peu près entre les deux opticiens.
Aspect médical et prise de mesure
La prise de mesure est sans doute l’aspect le plus délicat de la vente de lunettes en ligne. Si l’internaute a à sa disposition l’ensemble des mesures (écart pupillaire, sphère, cylindre et axe), il suffit de les rentrer.
Sinon Sensee propose de calculer son écart pupillaire à l’aide d’une webcam. Le logiciel vous demandera de positionner une carte bleue sous votre nez, elle servira à étalonner la photo. Pour les détails de la correction il faudra contacter l’un des opticiens Sensee.
La délivrance de lunettes de vue reste conditionnée à l’envoi d’une ordonnance. Sensee vous transmet après l’achat tous les documents nécessaires au remboursement par la sécurité sociale et par votre complémentaire santé. En revanche il n’est pas fait mention de tiers payant.
Reste le problème de l’ajustement. Sensee procède à un ajustement standard de vos lunettes. Pour le modifier il faudra vous rendre chez un opticien traditionnel ou bien habiter près de l’unique boutique Sensee, avenue de Suffren, à Paris.
La réassurance
Des doutes, des questions ? Sensee vous rappelle gratuitement, un service qui me semblait jusque-là l’apanage des grandes banques. Vous pouvez aussi les appeler directement sur leur numéro vert, chatter ou bien leur envoyer un mail.
Malheureusement ce service de réassurance se fait discret. Absent de la home et de la navigation à facettes, il faut cliquer sur le détail des fiches produits pour qu’il en soit fait mention. En revanche lors de la phase, critique, de la prise de mesure, le site vous propose à nouveau de prendre contact avec vous.
Sensee vous permet d’essayer jusqu’à trois montures à domicile, un service facturé 1€ tout compris. L’internaute peut commander ses lunettes dans la foulée avant même d’avoir renvoyé les montures.
Dernier point important : les lunettes achetées sur Sensee peuvent être remboursées, cash dans un délai de 7 jours après réception, sous forme de bons d’achat dans les 30 jours. On retrouve des conditions similaires chez la concurrence.
Signalons que Direct Optic propose lui de se rendre chez l’un de ses cinq opticiens partenaires (Paris, Marseille, Nantes, Bordeaux, Nice) afin de prendre ses mesures de correction, d’essayer les montures, d’ajuster et de rendre vos lunettes. Sensee possède une boutique avenue de Suffren à Paris, mais celle-ci n’est pas mise en avant sur le site.
Le module de réalité augmentée
Comme d’autres opticiens, Sensee propose un essayage virtuel des montures à partir d’une photo. Celui-ci est plutôt réussi. Votre portrait devra être pris de face, la contreplongée de notre webcam n’a pas fait merveille. Certains modèles passent très bien, d’autres ont un effet un peu « cartoon » qui ne sera pas sans vous rappeler « Qui veut la peau de Roger Rabbit ? ». Mais par rapport aux modules de la concurrence, la réalité augmentée de Sensee est une vraie réussite. Celui de Direct Optic ne centre pas correctement les montures et ne fait pas assez naturel, celui d’Happy View n’a pas su proportionner la monture par rapport à la taille du visage. Enfin celui de Confort Visuel demande d’être étalonné à l’aide d’une règle.
Sensee propose également un miroir virtuel (la monture suit les mouvements du visage), mais cette fonction n’est pas encore mise en avant sur le site.
Pour conclure
Sensee est toujours en bêta. Le site soufre ainsi de quelques erreurs de jeunesse mais reste très prometteur : le module de réalité augmentée est l’un des meilleurs que nous ayons vu et la navigation est impeccable. La réassurance devrait être plus visible et le prix des verres indiqué plus tôt dans le processus d’achat.
Sensee illustre toute la difficulté à vendre, à prix cassé, un accessoire de mode qui est aussi un produit médical. Son positionnement mode saura-t-il convaincre des internautes alléchés par sa promesse discount ?
Enfin, si Sensee est assurément moins cher que les opticiens traditionnels, il doit faire face à une concurrence on line qui va encore plus loin dans la baisse des prix, en témoigne ceux pratiqués par le franco-coréen Direct Optic.
Article initialement publié sur lab.vente-privee.com .
Passionné d'innovation, ex Natixis, Groupe La Poste et Lab vente-privee.com. Le Phare Digital est un blog personnel, mes opinions n'engagent bien évidemment que moi.
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